Agriculture paysanne ou industrielle : attention, faux-débat !

Les faits

Sus à l’agriculture industrielle ! C’est désormais devenu un leitmotiv.  Hier soir encore, France 5 diffusait un reportage à charge, « manger sain : info ou intox ? » et répétait en boucle : « depuis plusieurs années, on oppose la nourriture industrielle à l’alimentation naturelle ».

La connexion de ces deux mots – agriculture & industrielle – s’est imposée dans les débats, notamment au moment de la contestation de la ferme des 1000 veaux dans la Creuse et dans celle des 1000 vaches dans la Somme. C’est la Confédération paysanne qui a imposé cette terminologie dès 2015. Objectif : élargir les luttes. Consciente que la bataille de la communication se gagne d’abord par la sémantique… !

Dès lors qu’un problème survient dans une filière agricole, ces mots « valise » surgissent. Le procédé est même devenu classique dans les salons parisiens. Deux mots « guillotine » pour disqualifier l’adversaire.

Il y aurait d’un côté l’industrialisation forcément mauvaise et de l’autre l’agriculture paysanne évidemment vertueuse. Une façon habile de ne pas donner de sens ou de définition à ces mots.

Décryptage

Que signifie l’industrialisation de l’agriculture ? En soi, pas grand-chose ! On pousse de hauts cris. Les arguments ainsi assénés jouent sur les peurs, l’ignorance et l’émotion de la population.

Revenons au réel. En agriculture biologique, on trouve des exploitations de 250 vaches laitières, équipées avec des robots de traite. S’agit-il pour autant « d’agriculture paysanne » ?

Le capital financier pour un tel équipement fait voler en éclat la dichotomie entre ce qui serait « paysanne » et « industrielle ».

Autre exemple. Celui de la chèvre dont l’image est ô combien écologique. Pourtant dans la production caprine y compris biologique, l’immense majorité des animaux ne va jamais brouter un brin d’herbe dans un champ. Tout simplement car il est très difficile de maîtriser le pâturage de la chèvre et d’assurer une bonne qualité d’herbe.

Ce rêve d’une agriculture paysanne a été largement théorisée. Aurélie Trouvé, ancienne vice-présidente d’ATTAC et maître de conférences à l’Établissement national d’enseignement supérieur agronomique de Dijon, l’a fait dans son ouvrage « Le business est dans le pré. » Mais revenir à des élevages de taille modeste ne peut tenir que dans une vision restreinte à un marché national et fermé. Les tenants d’une agriculture paysanne rejettent en fait l’idée que l’agriculture puise avoir des ambitions à l’exportation. Adieu donc Champagne et autres Cognacs… !

Le vrai débat

En réalité, l’accusation « d’agriculture industrielle » est employée dans les tribunaux médiatiques. Mais elle ne sert pas le débat sur les enjeux agricoles.

Veut-on que la France continue à produire ou préfère-t-on rêver d’une agriculture dite paysanne qui n’existe pas ?

Rêver d’une agriculture « comme autrefois », c’est refuser de voir le monde tel qu’il est.

Car au Sud (avec l’Espagne notamment) et au Nord (avec l’Allemagne et les pays nordique y compris la Pologne), nos partenaires avancent. Aux Pays-Bas par exemple, la production de lait de chèvre se développe depuis 10 ans.

De notre côté, notre agriculture stagne voire emprunte le chemin mortifère de la décroissance.

Osons donc choisir nos modèles agricoles après comparaison avec ce qui se passe dans d’autres pays.

 

Evitons le nombrilisme…

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