Si la politique de la ville était efficace, ça se saurait !

Les faits :

Aujourd’hui, 22 mai 2018, Emmanuel Macron a réuni à l’Elysée les principaux acteurs de la politique de la ville pour leur présenter les mesures du gouvernement en direction des quartiers défavorisés.
Le ton est donné : pas de « plan banlieues » ni d’investissements massifs mais une « philosophie » et une « méthode » à construire. Une vision en rupture avec les précédentes politiques de la ville, qui ne se décline toujours pas en propositions opérationnelles.

En effet, la France a investi un stock de capital considérable dans les politiques de la ville depuis son lancement officiel en 1977 ! L’addition se chiffre maintenant en dizaines de milliards d’euros. Dans la plupart des cas, en pure perte. La politique de la ville regroupe de nombreuses thématiques au point qu’elle a changé de périmètre à de nombreuses reprises. La Cour des comptes notait dès 2012 que l’analyse des crédits versés par l’Etat est rendue difficile par la confusion des politiques urbaines. La question centrale de la rénovation urbaine pilotée par l’ANRU (l’Agence nationale de la rénovation urbaine) et l’ACSE (Agence pour la cohésion sociale et l’égalité des chances) est depuis mars 2014 placée sous la tutelle du Commissariat général à l’égalité des territoires.

Bref, la France a multiplié les structures dans sa longue tradition administrative et jacobine. Les zones franches (fiscales) ont produit de nombreux effets d’aubaine sans vraiment répondre aux attentes des territoires en difficulté. Les politiques de la ville en direction des quartiers défavorisés souffrent de l’effet de saupoudrage. Les sommes investies augmentent tandis que les problèmes se multiplient. Qu’on en juge à travers ces quelques chiffres : Les territoires qu’on appelle « les quartiers » concentrent entre 5 et 6 millions de Français. Le taux de chômage y est très supérieur à la moyenne nationale (25% contre 9%), 40% des habitants sont considérés comme pauvres et le taux d’activité y est très faible.

Décryptage :

Pour Emmanuel Macron, présumé Président des riches, l’enjeu du débat est d’abord de reprendre pied dans l’électorat populaire. M. Macron avait officialisé sa candidature à la présidence de la République au Centre de formation des apprentis de Bobigny en Seine Saint Denis. Toutes les études d’opinion montrent que la politique de son gouvernement est désapprouvée par une majorité de l’opinion populaire. Le retrait massif et brutal des contrats aidés a renforcé ce sentiment du deux poids-deux mesures et se fait durement ressentir dans les quartiers populaires.

M. Macron revient avec la promesse d’emplois « francs » prévus pour 2018 et budgétés en urgence sur la base d’un amendement de la majorité pour le projet de budget 2018 (10 000 emplois francs avec une subvention de 2500 € pour un CDD de plus de 6 mois et 5000€ par CDI).  A Saint Denis et dans le nord de la France, Emmanuel Macron en appelle à l’égalité des chances mais aussi à l’émancipation. L’émancipation postule le principe de la responsabilité personnelle, de la volonté. S’agit-il d’une rupture avec la politique de guichet qui a longtemps prévalu dans les territoires défavorisés ? L’avenir nous le dira.

Le vrai débat :

L’Etat ne peut pas tout et si la solution des difficultés reposait uniquement sur des moyens financiers supplémentaires, la France aurait réglé ses problèmes d’inégalités territoriales. Les vérités dans ce domaine ne sont pas clairement énoncées pour des raisons essentiellement politiques. Les quartiers populaires absorbent une part importante de l’immigration. Par ailleurs, ils sont marqués par une forte délinquance associée à une situation sociale très dégradée : trafics divers et insécurité des personnes et des biens. Certains élus locaux ont fait de cette situation un fond de commerce politique.

La gauche française s’est très vite trouvé des alliés politiques dans les mouvements associatifs nés de la marche des beurs en 1983. Les intérêts électoraux ont rapidement pris le pas sur tout le reste. En banlieue parisienne, des maires favorise l’installation de population très démunie créant ainsi des corridors à misère au détriment du développement économique. Les premières mesures à prendre pour sortir ces quartiers de la crise seraient d’y rétablir l’ordre républicain. Jusqu’à ce jour la volonté a manqué et les gouvernements se sont contentés de mesures correctrices insuffisantes, sans jamais s‘attaquer à l’activité des trafiquants et des bandes organisées qui interdisent l’installation durable d’une activité économique stable et durable. Au surplus, l’Etat ne procède pas à une évaluation régulière de ses politiques urbaines. Les solutions proposées sont inefficaces mais nous persistons en amplifiant les mesures prises. A chaque fois, c’est l’autorité de l’Etat qui est contestée et c’est l’argent public qui est jeté par les fenêtres.

 

 

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